« Voir des apprivoisements est une chose qui plaît. Notre suprême contentement est de regarder défiler toutes les variétés de la domestication. »
Victor HUGO
Bonjour,
Je viens de lire sur votre site « Collectif Ruptures » un entretien (1) avec les auteurs du « Manifeste conspirationniste » publié aux Editions du Seuil au début de l’année 2O22. J’ai particulièrement apprécié les extraordinaires et utiles vérités que cet ouvrage contenait, que des endormis semblaient découvrir subitement telles d’incroyables nouveautés, et contre lesquelles « un milieu » au service de tous les mensonges s’est insurgé afin de donner à leur bel ensemble la touche de perfection démocratique qui lui manquait et rejoindre ainsi sa lèpre originelle (cf. « Le naufrage réactionnaire du mouvement anti-industriel », libelle infâme de la nouvelle police et de l’avant-garde cybernétique par lequel ils nous signalent leur état de fusion accomplie ; ou consulter Lundimaton, l’un des bulletins informatiques des « progresseurs » et des « comprachicos » de la post-modernité, gardien des passivités agitées ; ou encore lire la nouvelle définition du mot nature par Les Soulèvements de la Terre qui nous vantent sans honte le « chemtrail » transexualiste et ses mutilations subséquentes ).
J’ai d’ailleurs consacré à ce « Manifeste », si original qu’il semblait sortir tout armé du cerveau de ses auteurs, sans que rien n’ait paru le précéder ou même qu’ils y aient fait allusion de crainte de ternir leur réputation, un article sur le site birnam.fr intitulé » Sur l’invention de la machine arrière » (1) publié le 31 janvier 2022 : les dates ayant ici toute leur importance comme on le verra dans la suite de ce courrier. J’y écrivais en guise de conclusion, en remarquant que ces courageux auteurs avaient attendu pas moins de deux ans pour nous livrer la quintessence de leurs funestes méditations, que leur ouvrage coupanonyme resterait comme une remarquable avancée en matière de critique, puisque celle-ci, désormais détachée de tout lien conflictuel avec la réalité, en venait avec une certaine exactitude, à prédire le passé, qui a pour qualité dans « la société cybernétique » d’être tout aussi malléable et fuyant que l’avenir (2).
Or dans le cours de votre entretien – dans lequel ces fayots de la promotion font les cakes avec leurs tardives thèses émises si prudemment qu’ils attendirent que le gros du choc du coronaruption s’éloignât, et que le spectacle passât avec allégresse à autre chose ainsi que de coutume, pour les exhiber sur le Seuil – j’ai remarqué, parmi plusieurs thèmes qui auraient mérité un développement (3), que ces spécialistes du retard programmé se plaignent amèrement de la censure. Elle les a laissés le cul par terre après les avoir de manière si inconsidérée, pour ses intérêts, portés au pinacle dans une boucle de rétroaction idéologique qui servait à la fois une stratégie politique et des impératifs commerciaux. Le « Manifeste » était aussi un produit de marketing, effet d’aubaine pour une entreprise en perfectionnement d’image, ils en ont été les mercenaires. La « dépublication » de cette marchandise a mis à l’arrêt la production industrielle d’un objet qui n’était plus vraiment en adéquation avec les objectifs commerciaux et les manipulations politiques de l’entreprise et de ses patrons cherchant à contrôler un secteur de l’opinion, ni même avec les attentes d’une clientèle qui refuse de payer ce que d’autres lui offrent – lui ont offert – gratuitement et sans délais. La « dépublication » a d’ailleurs correspondu avec une péripétie politique du parti médiatique, qu’il n’est plus besoin de décrire. Cette « censure », chez qui ils ont eu l’imprudence d’aller se réfugier, en est même venue à congédier, à les en croire, l’un de ses périssables employés sous ce fumeux prétexte que les subalternes sont en droit d’invoquer légitimement désormais partout où la concurrence fait rage entre eux – le nombre de chaises étant sévèrement fixé parmi les anti-complotistes. Censure que ces grands connaisseurs définissent avec un bonheur rare, parce qu’il leur faut entrer ce pieu maigre et nu jusqu’au cœur pour ne pas paraître plus que des victimes dans ce jeu avec la vérité qu’ils ont choisi de desservir par leurs dissimulations prolongées, qu’ils ne nous expliquent toujours pas, pas plus qu’ils ne nous racontent ce qui les a emmenés vers le récif et ses remous. Je les cite et je souligne, car ils donnent une définition précise de cette malveillante censure qui paraît sourdre de partout dans « la société cybernétique » 1-« Inventer une procédure sans précédent pour le faire disparaître de la circulation. » le se rapportant évidemment à leur ouvrage et non pas au site birnam.fr 2-« La perfection est atteinte quand on censure jusqu’au fait que l’on censure« . Ce qui me semble être la parfaite définition de leur métier, que l’on fait mine d’oublier pour eux alors qu’on n’hésite pas à le remarquer et à s’en scandaliser bruyamment pour d’autres. Chacun peut en trouver la confirmation en parcourant le site birnam.fr qu’ils ont pillé sans vergogne – ils ne sont pas les seuls –, sans jamais en faire mention, sans même l’évoquer comme une source évidente d’inspiration de leur instructif et épais duplicata. Je vous le disais métaphoriquement en commençant ce courrier, ce qui peut aussi s’énoncer ainsi « Perfection : état de ce qui a atteint sa plénitude, de ce qui a été poursuivi jusqu’à son terme, de ce qui est parvenu à son terme… » C.N.R.T.L.
En faisant disparaître leur gros et gras ersatz, ce dont nos fabricants anonymes se plaignent, les gestionnaires politiques des Editions du Seuil n’ont fait qu’accomplir un programme qui ne pouvait pas s’arrêter en si bon chemin ; qui avait si bien commencé qu’il ne pouvait finir son escamotage qu’en escamotant leur contrefaçon dans une époque où même les lecteurs seront escamotés, sont déjà escamotés, sans qu’ils sachent au profit de qui ou de quoi ils seront remplacés, qui ont oublié qui leur parle de ce qu’ils ont oublié depuis longtemps et pourquoi cela se poursuit dans l’indifférence générale. En sont-ils conscients nos Pinocchio, ou faudra-t-il faire un dessin à ces oublieux parasites littéraires qui ont pris leur abattoir pour un reposoir, qui en sont venus jusqu’à s’escamoter eux-mêmes et leurs précédentes thèses anti-complotistes ?
Cordialement,
Jean-Paul Floure
- Le dix septembre 2024
- « Ce fut un coup du monde ». Tout le pronostic est dans le passé simple. Il faut s’attendre, pour les mois qui viennent, à ce qu’ils nous dévoilent qui va sortir de Moscou en feu, en long et en large ». SUR L’INVENTION DE LA MACHINE ARRIERE, 31 janvier 2022
- Le thème paradoxal de l’anonymat, par exemple, puisqu’il semble que ces gens très attachés à leur anonymat tiennent à l’être généreusement pour tous – anonymes –, sauf pour les services de police pour qui ils font une exception imméritée et presque gracieuse. De plus ces pauvres services, bien incapables d’établir une filature efficace, à les croire, tentaient d’empêcher la diffusion de thèses qui, par ailleurs, circulaient mondialement depuis mars 2020 à partir du site birnam.fr et que le pauvre milieu auquel vous appartenez – je vous ai lus – a considéré avec « silence et dédain » comme vous l’avez dit dans la présentation de cet entretien, alors qu’un grand nombre les connaissait, connaissait le site où l’on pouvait les lire, et s’était fait un devoir de les combattre sans les citer ou, plus classiquement, de les dissimuler sous un silence tonitruant et plus efficacement que cette misérable police officielle ne l’a fait ; son véritable critère de surveillance et de contrôle étant ailleurs pour qui connaît. Il y a aussi le thème de « la collaboration » de la gauche radicale avec les instances de la « société cybernétique » sur lequel vous ne vous étendez pas plus que cela, et qui mérite, à lui seul, un développement complet que ne voyons toujours pas venir – honni soit qui mal y pense. Enfin le thème de « l’avant-garde cybernétique » et de sa participation à la campagne gouvernementale de délation de l’anti-complotisme auquel nous avons consacré plusieurs articles. Le sinologue Jean LEVI, dont vous devriez lire les remarquables ouvrages, parmi lesquels sa traduction du livre du prince Shang, a écrit au sujet d’une contrefaçon – « le risible faux bureaucratique chinois » –, autrement considérable que ce « MANIFESTE », en guise de conclusion à un entretien publié en mai 2012 :
« Dans les sociétés totalitaires comme la nôtre ou comme la Chine ancienne, qui en présente la préfiguration archaïque, le Pouvoir se diffuse à travers l’ensemble du tissu social, et aboutit à ce que Marx a appelé la socialisation totale de la société en mettant chacun dans la dépendance de l’autre. Contrôlant chaque organe du corps social, l’État est maître de toutes ses manifestations, même celles qui semblent les plus spontanées. Dans un tel système, tout fait partie de l’État, même l’opposition et la dissidence ; le terrorisme, loin d’être la manifestation d’une quelconque extériorité, est son émanation la plus pure : non seulement les groupuscules censés menacer l’ordre n’échappent aucunement à sa vigilance, mais ils servent de justification aux mesures répressives qu’il édicte, ainsi que le montrent d’ailleurs certains développements de l’actualité récente.
Giorgio Agamben, dans son Homo Sacer, croit pouvoir rapprocher le concept d’exception souveraine qu’il dégage de la théorie de l’État élaborée par Carl Schmitt de la notion d’événement d’Alain Badiou. Celui-ci, appliquant les catégories d’appartenance et d’inclusion de la théorie des ensembles à la politique, définit l’événement comme un élément dont l’appartenance à la situation apparaît, du point de vue de la situation, indécidable et est donc tenu par l’État comme une excroissance — c’est à dire une anomalie. Ainsi l’exception exprimerait l’impossibilité pour un système de faire coïncider l’inclusion avec l’appartenance et de réduire à l’unité toutes les parties. Mais en réalité, il n’en va nullement ainsi dans les grandes structures étatiques. Celles-ci savent réduire toutes les parties à l’unité en fabriquant elles-mêmes des événements de toutes pièces. Elles ne sont prises au dépourvu que pour désarçonner un adversaire lui-même désemparé par l’imprévisibilité du cours des choses. L’État ne feint de se laisser surprendre par l’exception que pour reprendre en main la situation, car c’est lui qui décide, en dernier ressort, de l’État d’exception. Le Pouvoir suscite les troubles qui nécessitent le recours à des mesures d’urgence, afin de rester maître du jeu : c’est là le meilleur moyen de restaurer l’ordre dans la société et d’assurer sa prise sur les individus, en édictant les mesures coercitives requises par la gravité du moment. De telles tactiques, énoncées de la façon la plus claire par Han Fei, le théoricien du pouvoir absolutiste et centralisé chinois du IIIe siècle av. J.-C., ont été tout au long de l’histoire, aussi bien en Chine qu’en Occident, appliquées par les Princes et les États.
La plupart des complots contre la sûreté de l’État cachent le plus souvent un autre complot fomenté par l’État lui-même contre la sûreté des citoyens et la liberté des individus. »
ANNEXE
(…) Les mensonges médiatiques, c’est une loi, deviennent vite contre-productifs : ressassés imbécilement, ils sont, à la longue, reconnus pour leurs aspects fantastiques, qui les plombent et leurs aberrations calculées, qui les enfoncent. En outre, les têtes de morts rassemblées à la hâte qui les récitent, en claquant en cadence leurs invraisemblables 64 dents de synthèse – élaborées à seule fin de les empêcher de fermer leurs gueules et nous ménager des temps de repos – ne font plus vraiment illusion. Ces mensonges et falsifications sont vite entourées d’une légitime suspicion : populiste pour parler la langue des blindés médiatiques quand ceux-ci aperçoivent les escadrons de pigeons, qui écoutaient, hier encore, sagement leurs collections de gags éculés inventés sur toutes sortes de sujets, s’envoler vers des horizons moins chargés en immondices et où l’on ne s’enlise qu’à hauteur de moyeux plutôt que de s’engager dans cette boue jusqu’aux oreilles. Force est de reconnaître que les mensonges de l’instant émis dans le flux médiatique et dans l’urgence du complot général, ne sont là, le plus souvent, que pour emmener d’une façon très étudiée, une partie de leurs publics éblouis vers de nouvelles explications officielles nettoyées de leurs plus sottes fantaisies. Ceux qui gouvernent, avec des fortunes diverses et pour le pire – c’est le seul progrès qu’ils se permettent – le flux permanent de la falsification, ont admis, pour le défendre face à de prévisibles révélations, qu’il valait mieux organiser et planifier progressivement leurs mensonges, en les diluant désormais dans des séries de demi-vérités dévitalisées, sur lesquelles quelques affidés marginaux de ce processus font mine de s’extasier en feignant de les découvrir post festum, alors qu’ils les avaient méthodiquement niées ou dissimulées le jour d’avant en promouvant le faux sous toutes ses formes.
Ces demi-vérités ont perdu depuis longtemps une véritable importance stratégique. Elles sont connues de tous, jusque dans le bourg le plus reculé de notre belle France. Beaucoup n’étaient pas sans les ignorer et désormais elles sont acceptées comme une confortable fatalité et appréciées comme une conséquence presque naturelle d’une servitude qui leur agrée puisqu’ils font en permanence le choix du « gouvernement le moins pire ». Mais ces demi-vérités aux arômes étonnants, qui tombent aujourd’hui avec parcimonie d’une machine informationniste en surchauffe – après les brutales vendanges du mensonge où chacun de ces confusionnistes de la gauche radicale est venu rajouter sa courte grappe de veuleries et de saloperies pressées – sont mieux adaptés et plus en rapport avec une réalité que les honorables agents de la radicalité ont nié, hier encore, avec opiniâtreté et mauvaise foi. Ces falsifications sont ridiculement lessivées et ont perdu toute espèce de saveur, tant elles ont attendu la permission des autorités pour être envoyées à la diffusion, que le gros du danger s’éloigne. Et pour nous avertir de surcroît qu’il vient de passer, le train du progrès. Ces borgnes de métier et ces assourdis de rencontre ne l’avaient ni vu venir, ni même entendu passer dans ce qui paraissait, à ces feuilles mortes que l’on ramasse à la pelle, être plus un reposoir qu’un tombeau. La société cybernétique ne leur est jamais apparue, sinon par fragments et, somme toute, dénuée dans ses déformations et transformations perpétuelles d’une ligne générale clairement définie, de centres de commandement, de structures d’exploitation, de contrôles et de surveillance de celles-ci, identifiables et localisables. Si basse est l’opinion qu’ils ont du monde qui les entoure de ses infinis sortilèges, qu’ils sont toujours persuadés ou, du moins l’espèrent, qu’on y croit à leur suite : que ceux qui gouvernent ne sont pas capables d’employer n’importe quel moyen pour le tenir durablement à leur disposition. Les récurés de l’idéologie supputent de loin, à la manière des crétins de l’écologisme domestique et du techno-marxisme, certains effets de ce gouvernement et passent vite à autre chose de moins brûlant : le détail très convenable de l’uniforme dont ils raffolent et qu’ils revêtent joyeusement, eux qui ne sont finalement que les ombres portées de la tyrannie dans les domaines qu’elle vient d’assujettir très récemment. Les divers variants de l’idéologie libérale-libertaire, toujours changeants, toujours très originaux, les posent dans leurs inavouables métiers depuis plusieurs décennies. Ils les spécialisent dans des passions minimales et refroidies, tolérées et conseillées par la machinerie du désastre. Passions retournées nécessaires à son fonctionnement et que l’on retrouve consignées et décrites dans les cahiers d’optimisation de la méga-machine dont leurs textes sont comme les résumés des meilleurs chapitres. Ces passions domestiquées sont aussi recommandées dans le traitement des culpabilités douloureuses dont souffrent de nombreux frankengauchistes récemment produits par la société cybernétique quand elle prétend réaliser ses pires programmes en initiant, par d’originales méthodes de management scientifique, une demande sociale spontanée qu’elle s’empresse de satisfaire ne fût-ce que pour obtenir sous une pression populaire les divers effets de ses désastres en cascades. Effets que ces frankengauchistes décrivent platement, techniquement, un peu à la manière machinale du nouveau roman, mais dont ils refusent de voir les intentions rationnelles et la logique stratégique qui les produisent ; ou plutôt s’ils admettent l’une, qu’ils font paraître par son côté le plus écrasant, le plus absurde et le plus aveugle, c’est pour aussitôt nier les autres, tactiquement. C’est cela qui les met presque spontanément à la remorque du parti médiatique et parfois, pour quelques-uns d’entre eux d’une manière cocasse – avec en contrepartie, et comme récompense, un petit quart d’heure de célébrité en tête de gondole où ils se poussent ainsi que des déchets de la promotion.
Certes ces calvinistes recomposés dans leur sorte de Genève du concept, parfaitement disciplinés dans leurs médiocres attentes d’un au-delà marchand garanti pure pénurie, réduit à quelques marottes à clochettes, voient bien par un certain côté les pratiques de leur temps, mais comme des ombres désarticulées s’agitant sans but et sans programme, perdues dans un décor de carton-pâte que ces agités de la calebasse et du slip se proposent de réaménager en centre de loisirs dans leurs rêves les plus fous : une utopie si fantastique qu’une fourmi s’y suiciderait, afin de parachever le géométrique et inquiétant édifice par une touche de franc désespoir, là où tout a été repeint en marron.
Ces explications nouvelles paraissent innocemment et latéralement, presque confidentiellement, après que les grands audacieux qui les écrivent en aient lu et recopié beaucoup d’autres en les affadissant, pour implanter leurs systèmes et leurs suites d’opérations de dérivation dans leur langue spécifique. Ils ne citent rien, pas même ce qu’ils sont supposés combattre au nom d’un bien commun qui transparaît en filigrane et légitime en apparence leurs affirmations les plus boiteuses. Bien commun et projets dont la définition complète, perpétuellement remise à demain, coïncide, toujours et miraculeusement, avec les intérêts pratiques de la classe dominante et de ses programmes d’asservissement. Ils obéissent en cela au sévère cahier des charges publié par le ministère de la Vérité. Celui-ci n’a jamais caché son existence et encore moins la façon dont ses diktats imprègnent la totalité de la sphère culturelle, mais ses agents se prétendent indemnes de toute adhésion à ses sommations propagandistes et font scandale des affirmations contraires, rien ne leur paraissant plus odieux que d’être soupçonnés de se vendre alors même qu’ils touchent. Les intellectuels organiques de la société cybernétique en fin de compte, la préfèrent renforcée et améliorée par une critique qui a épuisé ses capacités négatives au fil du temps. Elle les a perdues en poursuivant tous les lièvres qui passaient au bout de son horizon, sans jamais être en mesure d’en prendre un seul dans ses filets. Elle n’est plus désormais qu’un vulgaire passe-temps de cette nouvelle cléricature comme l’a été, autrefois, l’écriture de panégyriques par leurs ancêtres.
Ces Frankenstein de la persuasion – cette violence suave et dissimulée où tout doit être retaillé et rabattu vers l’agora des marchandises – semblent toujours débuter dans la carrière. Ils viennent d’arriver et sont de modeste allure dans leur charcuterie nominaliste. Ils ont expurgé grossièrement ce qui ne correspondait pas à la taille d’un récit officiel prêt à se corriger de ses plus énormes excès et de ses pires abus, et saucissonnent le restant à la dimension de cette agora des marchandises en voie d’achèvement. Ils veillent avec précaution sur la production du récit historique officiel, corrigent ses excès, arrondissent ses contours, amendent son irrationalisme foncier, remanient sa chronologie, lissent et corrigent l’enchaînement des faits, effacent certains évènements, inventent des cohérences inédites, évitent les hiatus qui laissent leur clientèle déçue quant à la qualité de la marchandise qu’on leur refile, dessinent méticuleusement les frontières qu’il ne faut pas franchir. Ils utilisent les ressources de la censure par omission, ne nomment rien sous son véritable nom : c’est jusqu’au mot « travail » qui est menacé de disparition. Ces rectifications nouvelles bouclent, de leurs chevaux de frise caractéristiques, le périmètre sans cesse mouvant des falsifications en cours et les protègent. Il est à remarquer également, et cela ne manque en aucune manière dans les fulminations de ces castrats, la reconstruction mémorielle et l’élaboration des cadres de son expression comme élément central d’un contrôle social affiné venant nous les briser par son côté apparemment hétérodoxe, jusque dans le groupe supposé minoritaire dont il sourd par nécessité. La mémoire individuelle, si vacillante et souvent incertaine face à la déferlante médiatique, doit en venir jusqu’à douter de ses propres souvenirs et plus encore de ceux des autres.
Emises sournoisement et à bas bruit, avec un grand retard – le fameux recul qui les classe dans la grande déchetterie du spectacle – dans un écart circonspect, racontées par les attardés et les flicaillons du gauchisme culturel recrutés dans tous les milieux de la décomposition, ces explications ne sont ni tout à fait exactes, ni vraiment fausses. Elles sont mieux adaptées à l’état actuel d’une opinion qu’il faut désarmer en permanence et tenir à la traîne de l’explication spectaculaire décomposée-recomposée. Elles veulent convaincre par un habile panachage avec des vérités qu’elles ramassent discrètement, dans le seul but de les annuler, par derrière et sans trop de bruit, dans leurs paniers à salades ; et par la suite d’en faire un parfum que l’on verse sur les tromperies les plus malodorantes du parti médiatique. Il s’agit de les rendre plus adéquates aux fins visées en les réintroduisant par la bande en suivant les règles édictées naguère par la Stasi, entre autres, sous le terme de « Zersetzungsmassnahme » ou « mesures de désagrégation » (cf. l’anti-complotisme étant l’une de ses formes les plus améliorées de la panoplie de techniques désagrégatives au service de l’ordre cybernétique et de sa défense en profondeur, à côté de la répression linguistique, des procédures lgbt, du « managering », que cet anti-complotisme en est venu à séduire naturellement et prioritairement ce qui se poste du côté gauche des illusions, au point d’en devenir la marque d’infamie distinctive (…)
Notes éparses sur la nuit cybernétique.
ADDENDUM SUR LES 101 DALMATIENS APRES LA DISPARITION DE CRUELLA
Les auteurs du bulletin Négatif nous ayant envoyé le numéro 34 de ce bulletin, une sorte de résumé involontaire de leur effondrement radical qui marque l’émergence d’un nouveau glossaire participatif, nous leur avons répondu le 14 octobre 2024, en leur souhaitant un prompt rétablissement :
Bonjour,
Je vous remercie pour l’envoi du numéro 34 de votre bulletin qui gagnerait à l’être vraiment : « irrégulier ».
Je suis désolé que les diverses danses, rituels et transes* auxquels vous vous êtes livrés, avec une religiosité excessive et une obstination butée, n’aient point eu, après vos 33 rotations, le succès que vous étiez légitimement en droit d’attendre – la pluie n’est pas venue. Vous devriez revoir, peut-être, les bases de votre credo et ses dogmes spongieux ou mieux répéter ces rituels, après quelques réglages : il suffit, parfois, d’une simple erreur d’un oblat dans l’exécution de la partition pour tout foutre en l’air ou par terre.
Guattari, Claude Roy, Annie Téléramort**, les Soulèvements de la terre… qui d’autre encore ? Est-ce un effet secondaire inattendu provoqué par une critique en état de mort cérébrale.
Jean-Paul Floure
* “praxis trucmuche” selon votre dictionnaire des astuces.
** Vous devriez vous interroger sur l’exacte fonction que cette dame occupait dans le “dispositif”, versant culturel, que vous avez sous les yeux depuis plusieurs décennies et qui semble vous agréer sur de nombreux aspects.