Le stade préliminaire de la nouvelle série d’expériences que nous allons décrire – et qui dura onze ans – fut l’élevage d’un groupe d’animaux sur de la terre noire et d’un autre groupe sur un sol jaune. Dans le premier groupe les taches jaunes diminuèrent peu à peu jusqu’à devenir très petites au moment de la pleine maturité vers la sixième année. Dans le second, les taches jaunes s’élargirent et se mélangèrent pour former de grandes raies.
Arthur Koestler, L’étreinte du crapaud
Je veux voir les têtes rouler, jivaros… réduites … Je veux jouer au foot avec…
Mehdi Belhaj Kacem
Bonjour Mehdi Belhaj Kacem,
J’ai écouté l’un de vos bavardages promotionnels sur la plate-forme Odysée* : un mélange mal dosé de flatteries et de commandements au peuple, et il m’est resté un doute quant à la qualité et à la fermeté de vos positions – en plusieurs endroits vous exprimez plutôt des convoitises que des critiques. J’ai donc plusieurs questions à vous poser et je les crois légitimes au regard de votre parcours intellectuel en zigzag, et de votre récente mutation.
1- A votre avis quel est le degré de confiance que mérite un transfuge du gauchisme culturel qui a été, pendant une décennie, le disciple fidèle du crétin Badiou (a), avant de s’en éloigner, attiré par les pompes de Bernard-Henri Levy l’humaniptère sur zone (b), pour y renoncer ensuite ? Peut-on se fier à un bouffon tel que vous, qui prétendez ne pas vous être informé, au préalable, sur cet inébranlable coryphée du Parti Médiatique ? Mentez-vous naïvement, comme il est de mode de le soutenir chez la plupart des frankengauchistes sidérés, ou avez-vous des défaillances cognitives épisodiques – trous de mémoire, tremblements, bourdonnements et acouphènes, divers troubles psychiques qui vous ont conduit à une relative perte d’autonomie dans vos jugements sur ce genre d’américain ? Etes-vous la proie d’une religiosité excessive avec un culte de la personnalité minuscule ? Etes-vous l’homme de toutes les adhésions ? En même temps ou successivement ?
2- D’après vous, et au vu de vos nombreux revirements – des plus anciens aux plus récents -, que valent réellement vos œuvres écrites sous de telles tutelles, revendiquées à chaque fois comme les choix les plus judicieux du moment ?**
3- Vos œuvres existent-elles vraiment ?
4- Si oui, selon quelles modalités ?
5- Ont-elles une quelconque utilité : décorative, intellectuelle, sociale, édifiante ou autre ?
6- Et pour qui ? Pour la société cybernétique dont vous avez été un employé prometteur (c) et qui est plutôt tolérante envers les diverses divagations de ses chiens de garde et ses moutons d’avant-garde ? Pour vous-même ( promotion accélérée par le vecteur littéraire ) et la certitude d’y gagner un certain standing dans la protestation accréditée ? Pour vos malheureux contemporains – la fameuse demande sociale? Pour un segment du marché protestataire qu’il faut alimenter en permanence par une production ad hoc – maintenir, quoi qu’il en coûte, les flux de la pacotille avec les habituelles techniques de manipulation bernaysiennes qui viennent de trouver, avec vous, un nouveau champ d’épandage dans un complotisme bien tempéré ?
7- Ces œuvres ont-elles pour but une vérité pratique ? Si oui, laquelle ?
8- Ou ne sont-elles que les agitations et les errements circulaires d’un esprit à la besogne qui a du mal à décoller avec son sac de nœuds, et se cherche une nouvelle piste d’envol et de publicité en mettant au point, avec quelques autres, une structure de contrôle spécialisée et prévisionnelle : un épouvantail cybernétique pour maintenir l’élémentariat dans ses plus stricts devoirs en élaborant un complotisme désamorcé, tolérable et plutôt court de tir – toujours les mêmes cibles –, adapté aux récits de la période post-covid et à ses reconstructions mémorielles – cf. Onfray ou le veau qui se trompe comme tout le monde?
9- Quelle est la valeur de vos nouvelles positions ? Sont-elles moins erronées que les précédentes ? Pensez-vous en changer bientôt ? En avez-vous aperçu d’autres, dans vos environs immédiats ? Vous paraissent-elles préférables pour votre carrière ultérieure ?
11- Le gilet jaune désactivé que vous portez, en tant que tenue de sudation idéologique, fait-il partie, désormais, des emblèmes des rêves négociables au même titre que l’écologisme et l’ensemble de ses variants et sous-variants alternatifs – néo-marxistes d’université, zadistes de centre-ville, complotistes tardifs, conspirationnistes prudents, anti-industriels injectés, anti-cybernéticiens du bois de Vincennes, intellectuels-retards en dépannage, situationnistes de Beaubourg, tartuffes de l’écoféminisme, protestataires académiques (vieilles surréalistes égrenant leurs chapelets d’images jaunies sur Téléramort et critiques-pompiers de garde), réchauffistes trépanés et néo-virologues quadruppanés émettant sur Lundimaton, leaders d’opinions protégés et autres extravagances ou foutaises de la décadence planifiée – de nouvelles espèces de refus acclimatés pour soutenir l’administration du spectaculaire décomposé dans ses travaux décomplexés ?
12- Enfin, un odieux soupçon m’est venu en considérant que vous léchiez, aussi et désormais, le cul – un cul par décennie – aux ferments bulgares de ce vendu de Sollers, comme si les deux précédents n’avaient pas été suffisants pour votre appétit vorace, ne seriez-vous-pas aussi un frankengauchiste avec gain de fonctions, vous qui semblez tout connaître en matière d’araignée cybernétique et de mouche anthropologique ?
Jean-Paul Floure
* Vidéo de MEDHI BELHAJ KACEM, diffusée sur Réseau International le 10 décembre 2022. La citation liminaire en est extraite. Les italiques sont de notre fait. Il est à remarquer que notre nouveau dissident-système – de troisième ou de quatrième génération – préfère voir que faire, être vu que défaire. C’est la signature de l’époque. Regarder : la marque de tous les retards ; être vu : le signe de toutes les adhésions. On peut en déduire toute une philosophie et un manuel de manipulations. « Je veux » : encore faut-il avoir le pouvoir de commander, mais à qui ? Ce n’est pas parce qu’un singe porte un uniforme de général qu’il est un général : il demeure un singe. On le constate régulièrement sur les plateaux de télévision.
** Je parle évidemment des multiples et différents monstres idéologiques d’élevage ou bouses apocalyptiques d’école que vous avez commis selon vos allégeances changeantes. Vos récentes découvertes sur le monde ne méritent pas un traitement particulier. Considérons-les comme une petite mise à niveau dans un environnement intellectuel passablement agité par les différentes formes de collaboration récemment mises en place par des structures de contrôle en phase d’installation ou déjà installées
*** Il tremble déjà à l’idée qu’il va recevoir votre livre – plutôt inutile, car tout le monde ou presque connait les indigents crétins stipendiés dont vous faites la promotion par votre critique-pompier– et peut-être même s’en cogner la lecture dans son luxueux étouffoir, lui qui écrit tous les jours son amour à la société cybernétique, tandis que soufflent épouvantablement les obus.
Questions subsidiaires :
a- Comment, vous, le prétendu « anarchiste », avez-vous pu être subjugué par cet imbécile de Badiou-l’extermination – il se reconnaît aisément par de nombreux signes de décadence spirituelle ouvertement affichés comme d’évidentes qualités humaines à respecter dans le panoptique cybernétique ? N’avez-vous pas ressenti au son de sa voix – infatuée – , à la vue de sa tête de dindon – éberluée – , à ses enfilades de concepts à la mords-moi le nœud, à sa logique réifiée justifiant les pires dictatures du siècle passé, une profonde aversion pour ce piteux fonctionnaire du mensonge bureaucratique, déjà répertorié il y a un demi-siècle ? Est-ce par arrivisme ou par déshumanisation ou les deux que vous avez fait silence sur cet authentique gardien platonicien ?
b- Vous prétendez avoir vendu, par « stratégie » (sic) les résidus de votre âme bien trompée, après votre long stage probatoire dans le Cambodge idéal de Badiou-la-piquouse, à l’acronyme infernal. Dans quel état vous a-t-elle été rendue après les fastes ? S’il ne vous l’a pas rendue, qu’en a-t-il fait dans son vivarium ? En abuse-t-il régulièrement et de quelle manière ? Seul ou en réunion ? Dans un lieu public ou dans un lieu secret ? N’y a-t-il pas là matière à scandale ? S’il vous l’a rendue où vous l’a-t-il remise ? Dans la bouche ou ailleurs? Cela mériterait d’être précisé pour votre public dont une partie reste persuadée qu’il existe une sorte de marché aux âmes et aux corps dans le Parti Médiatique avec des rabatteurs dans un style « comprachicos ressuscités » ; en plus sophistiqué et d’un tour presque légal : nos gouvernants hésitant à franchir ce pas trop ouvertement – un enfant pour tous – , certains archaïsmes moraux subsistant de manière regrettable chez les assujettis, et cela jusque dans la possibilité avant-gardiste du choix du sexe moral – une fois par an sur le tourniquet à l’anglaise – à l’entrée dans l’élémentariat émancipateur pour y devenir un travailleur libre de toute détermination.
c- Vous le proclamez sur tous les tons, en citant des gens que vous dénoncez par ailleurs : leurs flatteries à votre égard seraient-elles la partie la plus consistante de leurs œuvres ? Pourquoi n’y renoncez-vous pas publiquement ?
Addendum :
J’ai écouté vos admonestations – du verbiage de faux dur – destinées à la plèbe afin qu’elle sorte de sa supposée « zone de confort » en pratiquant une « méchanceté » tous azimuts. Pourquoi ne pas l’avoir pratiquée vous-même, cette méchanceté que vous conseillez aux autres en bon apôtre de la violence « symbolique », lorsque vous étiez sous contrat, en tant que rebelle apprivoisé, dans votre « zone de confort » *** ? Offrir, au mulet d’Etat Badiou, des dragées à la cantharide : pour rire un peu ; et filer un coup de satan à la sauterelle médiatique*** quand vous en aviez l’occasion. Il est vrai que vous n’êtes pas Ravaillac, tout écartelé que vous soyez entre tant de choix contradictoires dans votre boîte de Skinner.